Mesure n°5

Mesure n°5

Peinture Sentimentale n°19

Peinture Sentimentale n°19

Les lyonnais ont beaucoup de chance car, en ce moment, se dévoilent à leurs yeux les toiles du peintre Jacques Monory. L’exposition se déroule dans 2 lieux : la galerie de l’IUFM LYON CONFLUENCES qui présentent de grandes toiles, et la galerie anne-marie et roland pallade qui expose de plus petits formats. J’ai découvert l’œuvre de Monory un peu par hasard, grâce à la couverture d’un livre consacré à l’art depuis 1945. La qualité graphique du tableau sur la couverture m’a de suite frappée : le tableau décrit un homme figé sur sa chaise, visiblement atteint par 5 impacts de balle car se tenant le ventre. La scène est représentée par une vue en plongée sur un fond monochrome bleu.

Amateurs de bleu vous serez ravis. Si par exemple comme moi vous êtes fan du bleu IKB – « International Klein Blue » créée par l’artiste Yves Klein- alors la couleur d’arrière fond dans laquelle baignent les œuvres de Monory ne vous laissera pas insensible. Elle leur confère une puissance d’interprétation onirique terrible ! Ah ce bleu… Une « porte » romanesque s’ouvre sous vos yeux : le monochrome bleu lune qu’utilise Monory vous invite à rêver la scène et surtout fige l’action représentée. Regarder ses toiles vous procure le bonheur de sortir du réel et de vous projeter dans un autre univers. Ici en l’occurrence il s’agit d’une scène de crime, le contenu du tableau est figé à un instant t, précisément juste avant la tombée de rideau sur la mort – thème récurent dans l’œuvre de l’artiste-, figurée sur un fond bleu-nuit. Ce qu’il y a de merveilleux avec l’utilisation de ce bleu profond c’est qu’il brouille les repères chronologiques, le temps est suspendu, la victime du tableau réalise la situation et agonise… Le grand tour de force de Monory c’est, comme l’écrit Pierre Cabanne dans Combat du 28 juin 1971 :  « Tout le charme insidieux de Monory réside dans son aptitude à inscrire dans la forme et dans l’espace qui subsistent la qualité la plus fugitive de l’instant vécu ».

Les 2 expositions sont complémentaires : l’IUFM présente des œuvres qui couvrent la période 1972 – 2009 alors que la Galerie Anne-Marie et Roland Pallade présentent des compositions plus récentes,  allant de 2006 à 2010. Alors cher lecteur si tu te déplaces voir ces 2 expositions tu seras confronté à différents thèmes chers à l’artiste. La photographie notamment prend une part importante dans les toiles de Monory puisque ses tableaux projettent littéralement des scènes immortalisées sur le moment. Les autres thèmes récurrents sont le cinéma américain des années 50, les armes à feu, la mort, les femmes. Si Monory aime à se définir comme un peintre romantique par l’emploi systématique du bleu monochrome il n’en est pas moins un témoin de l’évolution du monde et s’engage en traitant des thèmes cités ci-dessus.

Voilà pourquoi je souhaitais vous parler de Monory : car aux rêves oniriques qu’il propose – à vous de vous faire votre propre film – l’artiste interroge ses contemporains de manière froide avec des sujets sensibles, c’est un grand témoin de notre temps.

F.B.

Photos courtoisie de Paule Monory pour Jacques Monory