Voilà une expérience que j’ai envie de partager avec vous, prétexte supplémentaire pour démontrer que l’art contemporain tisse de multiples liens avec l’histoire d’une ville et de ses acteurs.

Il y a environ 1 an, Anthony Nuguet qui tient l’excellentissime blog culturel Who cares ? me remettait un livre de James Frey dédié à Los Angeles et intitulé : L.A. Story (2009), après que je lui appris l’attraction particulière qu’exerce sur moi la mégapole de Los Angeles. Un heureux hasard puisque le Musée d’Art Contemporain de Lyon consacre à la Cité des Anges l’exposition temporaire : Los Angeles, une fiction. L’exposition se termine le week-prochain et j’ai fait en sorte de faire durer le plaisir puisque j’attends la semaine prochaine pour m’y rendre… Attendre le dernier moment pour savourer… comme une grande bouteille dont on espère le nectar exceptionnel et que l’on réserve pour une grande occasion. Surtout, je n’ai rien lu ni écouté quoi que ce soit à propos de l’exposition, pavillon auriculaire obstinément fermé. Le seul indice que je connaisse est la présence du livre de James Frey entraperçu dans la boutique du musée, un indice logique si l’on considère le titre de l’exposition.

Le livre de James Frey comporte l’originalité – je m’excuse pour ceux qui ne l’auraient pas lu ! – d’exposer, au début de chaque chapitre et en quelques lignes, une caractéristique, sous forme de fait chiffré ou historique, qui décrit la démesure de cette ville tentaculaire. J’ai donc décidé de me replonger quelque peu dans le livre et ses débuts de chapitres de façon à extraire les éléments/thèmes qui, selon moi, concourent à faire de cette ville un mythe. Je me dis aussi qu’une exposition d’art contemporain qui parle de L.A. doit, à un moment ou à un autre, refléter les démons qui l’habitent… Et redécouvrir ceux qui agitent mon inconscient à l’évocation de cette ville. Voici donc une liste de thèmes qui seront peut-être évoqués/traités à travers l’exposition. Mais rien n’est sur… Réponse sur le blog la semaine prochaine !

Couverture du livre de James Frey L.A. Story

Couverture du livre de James Frey L.A. Story. Merci Anthony !

Los Angeles possède une histoire douloureuse avec le Mexique, pays voisin. James Frey :  

En 1856, le nationaliste mexicain Juan Flores tente de fomenter une révolution destinée à libérer Los Angeles et rendre la Californie du Sud au Mexique. Il est arrêté et pendu dans ce qui est alors le centre-ville devant une foule de trois mille personnes.

→ Los Angeles est un patchwork de communautés qui viennent du monde entier. Les tensions raciales y sont très forte avec une histoire marquée par des émeutes fréquentes. James Frey :

En 1943, une émeute importante se produit à East Los Angeles quand les soldats de l’armée de terre, de mer et des Marines envahissent le quartier à la recherche de Mexicains portant ce qu’on appelle des zoot suits. On pense que les émeutes furent provoquées par le fait qu’un homme vêtu d’un zoot suit siffla la soeur d’un Marine dans la rue. Plusieurs centaines de Mexicains sont hospitalisés, trois sont tués. Deux jours après la fin des émeutes, le conseil municipal de Los Angeles vote l’interdiction des zoo suits dans les limites de la ville. 

Frank Romero, The Arrest of the Palesteros, 1991.

Frank Romero, The Arrest of the Palesteros, 1991.

L’industrie de Hollywood attire chaque année des milliers de prétendants en recherche de célébrité, chacun veut sa part du gâteau, mais le rêve tourne souvent au cauchemar. James Frey :

[…] Un nouveau film à succès.

Elle but son premier verre à l’âge de treize ans.

Un autre gros succès.

Fuma de l’herbe à quatorze ans.

Album.

Perdit sa virginité à quinze ans avec un acteur âgé de vingt-quatre ans.

Film.

Elle se faisait entre huit et dix millions de dollars par an, ses parents vingt pour cent.

Tournée.

Sa mère revint chez eux et la laissa avec ses gardes du corps. Le père ne rentrait plus du tout, les autres enfants avaient besoin que quelqu’un reste à la maison avec eux. Cocaïne à seize, meth à seize. Le boulot des gardes du corps était de la protéger, pas de l’élever. Quand ils essayèrent de la contrôler elle leur dit de la laisser tranquille ou ils perdraient leur boulot. L’un deux continua d’essayer. Elle appela sa mère, l’homme perdit son boulot. 

[…]

Los Angeles, ville de la criminalité organisée (dans les gènes), les gangs communautaristes y règnent en maîtres. James Frey :

En 1906, la première guerre de gangs d’envergure éclate entre les Dragon Boys (Chinois), les Shamrocks (Blancs à prédominance irlandaise), les Chainbreakers (Noirs) et les Rancheros (Mexicains). La police de Los Angeles, qui est à court de personnel et d’armes, est incapable d’y mettre fin. En dix-huit mois, trente-six personnes sont tuées, la plupart à coups de couteau, de bâton et de tessons de bouteille. En 1907, les Shamrocks commettent le premier meurtre à bord d’un véhicule en tirant sur deux Chainbreakers depuis un tramway. La guerre prend fin quand les chefs des quatre gangs se mettent d’accord pour ne pas empiéter sur leurs territoires respectifs.

Ou encore :

En 1985, huit cents meurtres sont attribués aux gangs dans la ville de Los Angeles.

Los Angeles et sa lumière si particulière attire les artistes, et certains “ont la cote”. James Frey :

Voici quelques artistes habitant et travaillant à Los Angeles, la spécialité ou les spécialités qu’ils pratiquent, et le plus haut prix atteint par l’une de leurs œuvres en vente publique.

Ed Ruscha, peintre, photographe – 3 595 500 dollars

Paul McCarthy, artiste de performance, sculpteur – 1 496 000 dollars

John McCraken, sculpteur – 390 000 dollars

Chris Burden, artiste conceptuel de performance – 84 000 dollars

Robert Graham, sculpteur – 390 000 dollars

Edward Kienholz (décédé), sculpteur – 176 000 dollars

Raymond Pettibon, peintre – 744 000 dollars

Kenny Scharf, peintre – 180 000 dollars

Mike Kelley, artiste multimédia – 2 704 000 dollars

[…]

Etc… la liste de James Frey comprend 20 autres noms ! 

John Baldessari, Stonehenge (With Two Persons) Orange, 2005

John Baldessari, Stonehenge (With Two Persons) Orange, 2005. John Baldessari est un des artistes californiens contemporains les plus connus au monde.

Los Angeles, ville de la démesure automobile. James Frey :

En 1958, Los Angeles est le plus grand marché automobile du pays et ses six millions d’habitants consomment plus d’essence par tête que les habitants de toute autre ville au monde.

Ou encore :

Il y a 27 millions de voitures dans le comté de Los Angeles, presque deux par être humain. Chaque jour, il y en a approximativement 18 millions sur les 33 240 km de routes principales secondaires et communales qui couvrent chacunes de ses centimètres carrés. En moyenne, 800 personnes meurent par an sur les routes de Los Angeles, et 90 000 y sont blessés. Il y a 29 autoroutes d’Etat, 8 autoroutes inter-Etats, et une autoroute nationale. […]

Los Angeles, une aire urbaine GIGANTESQUE !!! James Frey :

En 2000, Los Angeles est l’aire urbaine la plus diversifiée et au développement le plus rapide de tous les Etats-Unis. Si c’était un pays, elle aurait la quinzième économie au monde. On estime qu’en 2030 ce sera l’aire urbaine la plus étendue du pays.

Vue sur les lumières d'Hollywood depuis Mulholland Drive, célèbre avenue de LA

Vue sur les lumières d’Hollywood depuis Mulholland Drive, célèbre avenue de LA.

On aurait pu également évoquer les sujets suivants : Violence, pétrole, communauté Gay, James Ellroy, dictact de l’apparence physique, catastrophes naturelles, surf.

F.B.