Qu’est-ce que Museum Connections ?

Si vous êtes un fidèle du blog, vous savez que s’est déroulé récemment à la Porte de Versailles le salon professionnel Museum Connections (18-19 janvier 2017) dédié au business muséal, et dont le blog est partenaire média. Sur place, des exposants du monde entier spécialistes du merchandising et des produits dérivés pour les musées et les sites patrimoniaux sont venus à la rencontre de leurs clients. Museum Connections accueille aussi des entreprises dont le métier est la mise en place de dispositifs audiovisuels et multimédia pour la visite des musées, mais on y croise aussi des fournisseurs dont le métier est très axé sur le marketing. Ainsi, de nombreuses entreprises proposent des services dématérialisés qui permettent aux institutions culturelles de gérer leur billetterie (l’art du ticketing en d’autres termes  😉 sur tous les canaux possibles (site web, réseaux partenaires, messageries en ligne, réseaux sociaux et surtout, à l’heure où on parle “Big Data”, d’exploiter intelligemment les profils de leurs clients lorsqu’ils sont renseignés. Pour les non-initiés, on parle alors d’outils CRM (Customer Relationship Mangement) ou GRC (Gestion de la Relation Client) qui vont permettre au musée de personnaliser son offre sous forme de publicités ou encore d’emails. L’objectif : fidéliser un maximum le client de l’institution culturelle, améliorer sa satisfaction et par la même occasion accroître l’efficacité des employés de la structure et augmenter les ventes. En somme, un cercle vertueux économique sur lequel plus personne ne peut faire l’impasse ! 

Art Design Tendance, présent à l'entrée du salon !

Art Design Tendance, présent à l’entrée du salon !

Des conférences centrées sur le business muséal

En plus de réunir un panel d’exposants, l’équipe de Museum Connections a concocté sur 2 journées une série de conférences – avec aux manettes l’inévitable Diane Drubay – durant lesquelles des intervenants d’institutions culturelles du monde entier sont venus parler de leur stratégie pour précisément booster leur business. Je vous propose ainsi de revenir sur certaines interventions qui m’ont paru pertinentes.

Julie Aldridge, consultante spécialisée dans la planification d’entreprise, la stratégie marketing et le développement organisationnel et auparavant directrice générale de l’Association du marketing des arts (AMA) pendant plus de 11 ans, donne le ton de la 1ère journée. Elle présente un tableau, véritable schéma de développement du business model d’un musée -“Business Canvas Model“- qui répertorie toutes les variables sur lesquelles une institution culturelle peut agir. Les composantes internes et externes au musée sont prises en compte. Julie rappelle qu’avant de réfléchir à agir sur certaines variables, le management d’un musée doit posséder, si possible, une vision de sa proposition de valeur sur plusieurs années. Et de citer l’exemple du Santa Cruz Museum of Art & History. Ce musée, en difficulté financière, a fait le constat qu’il pouvait directement agir sur la fréquentation – le musée est connu mais les locaux n’y vont pas -. Les communautés locales ont ainsi été sondées et le constat fut établi qu’un lien fort les reliaient au musée : la pratique artistique. En permettant aux visiteurs d’être créatif au sein du musée, en écrivant par exemple un poème lors d’une visite, l’établissement a triplé sa fréquentation en rapprochant son public naturel de ses savoirs-faire. Point intéressant : pour arriver à ce résultat, les équipes du musée sont devenues expertes dans la conception de programmes pour la communauté locale. Le succès populaire du musée a rejailli sur le monde entrepreneurial, de plus en plus d’entreprises ont voulu être associées à l’image du musée (une autre variable d’ajustement) moyennant un financement de l’institution…

Nota : si vous regardez le site web du musée, vous constaterez qu’il organise, du 30 janvier au 27 mars 2017, un programme d’enseignement du piano réservé aux tout-petits . Quelle évolution dans les ressources et les choix effectués !

Julie Aldridge démarre le cycle de conférences de Museum Connections 2017

Julie Aldridge démarre le cycle de conférences de Museum Connections 2017

 

Business Canvas Model présenté par Julie Aldridge

Business Canvas Model présenté par Julie Aldridge

Quand le musée vend son expertise

L’intervention suivante était assez attendue, celle d’Adriaan Donszelmann, le Directeur du Musée Van Gogh d’Amsterdam. D’une part parce que le sujet était intéressant – utiliser l’expertise de ses employés dans sa stratégie de développement – et parce que les Pays-Bas sont un laboratoire très créatif pour inventer le musée de demain. Comme pour de nombreux musées, Adriaan Donszelmann fait le constat d’un retrait financier important de la force publique qui demande dorénavant à l’institution de se débrouiller… Ce à quoi nos amis hollandais répondent sans ambages : “ok, comportons-nous alors comme une véritable entreprise pour trouver de nouvelles ressources financières ». Comme Julie Aldridge, Adriaan Donszelmann a présenté sa “matrice personnelle” qui l’a aidé à prendre des décisions. Le modèle, en l’occurrence, est plus axé sur le marketing et le marché.

Un exemple m’a marqué dans l’intervention du patron du musée Van Gogh qui me fait dire que les musées, pour les plus avancés sur la question des financements, sont passés à une nouvelle ère et se comportent comme de véritables entreprises. Dans sa réflexion, Adriaan Donszelmann a expliqué que le musée a trouvé de l’argent grâce à ses ressources internes et sa propre expertise qu’il a pu monnayer. Ainsi, le Musée Van Gogh d’Amsterdam conseille une entreprise américaine dans la conception d’un système de climatisation adéquat pour un hangar commercial !

Sarah Hugounenq, journaliste spécialisée chez le Quotidien de l’Art est ensuite intervenue pour apporter la contradiction à Mr Donszelmann sur la limite à apporter – ou non – à la vision très pro-business du musée amsterdamois. « Cette orientation ne se fait-elle pas au détriment de la mission scientifique première d’un musée ? » Je ne sais pas ce que Vincent Van Gogh répondrait… toujours est-il que la réponse du Directeur de musée fut claire et limpide : « À partir du moment où nous ne prenons pas de risques pour la collection, nous considérons que nous avons les coudées franches pour trouver des sources de revenus, face à un Etat qui nous demande de nous débrouiller ! ». En outre, Adriaan Donszelmann considère qu’il serait dommage de ne pas profiter, pécuniairement, des nombreuses demandes de musées du monde entier qu’il reçoit pour le prêt de tableaux… Enfin, chose très intéressante, il nous révèle que jusqu’à 10% de l’emploi du temps des agents du musée peut être consacré aux services professionnels proposés par celui-ci – pour ceux qui le souhaitent – (prêts de tableaux, conseil aux entreprises, conseil en achat d’art, programmes pédagogiques conçus et vendus comme prestation) en dehors des missions classiques de service public… On imagine alors qu’il peut aussi s’agir de formations pour accompagner le personnel dans la transformation du musée en une entreprise prospère  😉 

The Van Gogh Museum Experience Alive : une exposition multimedia itinérante vendue par le Van Gogh Museum

The Van Gogh Museum Experience Alive : une exposition multimedia itinérante vendue par le Van Gogh Museum

 

Van Gogh Alive – The Experience, Promotional Video from GRANDE EXHIBITIONS on Vimeo.

F.B.