Impressions esthétiques

Si tôt rentré d’Art Basel, et frappé par l’élégance dégagée par les œuvres d’Ettore Spaletti, je me suis décidé à vous faire découvrir d’autres figures majeures de l’art contemporain italien de la seconde partie du XXème siècle. Cachotier comme je suis, je me suis bien gardé de vous parler d‘Agostino Bonalumi et d’Enrico Castellani représentés à Art Basel…c’est que j’avais gardé le meilleur pour la fin! De prime abord ma rencontre avec la toile Bleu, Sans titre, 1971 d’Agostino Bonalumi me remplit d’une heureuse impression visuelle. – plusieurs toiles portent le même nom, celle présentée à Bâle ressemble à la photo ci-dessous mais ce n’est pas exactement celle que j’ai vue, avis aux amateurs pour retrouver l’original !

Augusto BONALUMI, bleu, sans titre

Agostino BONALUMI, Bleu, sans titre

J’aime l’esthétique des toiles monochromes, pour peu qu’elles vous racontent quelque chose. Or, Bonalumi, je ne connaissais pas. Une toile d’un fond bleu intense, avec en relief une forme triangulaire dont on devine le travail d’intégration au dos. Une œuvre plastiquement très réussie, j’étais sous le charme, jusqu’à découvrir une autre toile, Superficie Alluminio, 1969, d’Enrico Castellani. ↓

                                                 

Enrico Catellani, Superficie Alluminio, 1968

Enrico Catellani, Superficie alluminio, 1968

Là encore une magie harmonieuse s’opère, mêlant le chic de l’argenté à l’aspect « capitonné » de la toile, magnifique !

Une nouvelle approche visuelle de la peinture

Enrico Castellani  est né en 1930 à Castelmassa (Rovigo), il vit et travaille à Celleno (Viterbe). Rapidement il fonde avec Enrico Castellani et Piero Manzoni un groupe partageant des idées et valeurs communes. En particulier ils créent la Galerie azimut ainsi que la revue du même nom, dans laquelle s’expriment les courant avants-gardistes internationaux. Les œuvres de cette génération artistique sont facilement reconnaissables : fonds monochromes – souvent du blanc – et surface de la toile tendue de l’extérieur vers l’intérieur ou vice-versa.

Enrico Castellani, Superficie Bianca, 1968

Enrico Castellani, Superficie Bianca, 1968

L’intérêt pour ce type de toile, outre esthétique, réside dans la redéfinition de ce qu’un tableau vous donne à voir. La toile ne doit plus seulement représenter 1 image mais en constituer 1 à part entière. Le « père » fondateur italien de ce nouveau paradigme est Lucio Fontana qui fonde le manifesto bianco en 1946. La toile devient une œuvre d’expérimentation : l’art devient « spatial », Fontana introduit des trous puis des découpes dans ses tableaux. Avec ce savoir-faire Fontana invente un dialogue entre la lumière, la couleur de la toile et sa matière. ↓

Lucio Fontana, ambiente spaziale, 1968

Lucio Fontana, Ambiente spaziale, 1968

 A découvrir sans modération donc

Pour Castellani et Bonalumi la toile devient « tridimensionnelle » : elle tient à la fois de l’art, de la sculpture et de l’archictecture. Les maîtres utilisent différents matériaux pour obtenir des points de tension qui créent le relief de la toile : clous, vis, différents objets. Et le résultat est souvent saisissant, comme : Bianco e nero, 1968 ↓

Agostino Bonalumi, Bianco e nero, 1968

Agostino Bonalumi, Bianco e nero, 1968

Le travail de Castellani en particulier est très abouti. Il découle d’une véritable recherche théorique, les effets de relief sont sciemment obtenus . Ainsi, contrairement à ce que beaucoup de personnes pensent, l’art contemporain ne doit souvent rien au hasard. Castellani a souhaité donner un nouveau sens au tableau.

Je vous laisse admirer et profiter de quelques explications sur son travail au travers de cette vidéo très bien réalisée : ↓

Si cette “mise en bouche” vous a plu, et si, comme moi, vous appréciez les toiles nues et monochromes, je vous recommande également de jeter un oeil aux travaux de Salvatore Emblema, Dadamaino ou encore Paolo Scheggi… Un régal pour les yeux! ↓

Salvatore Emblema, Senza titolo, 1978

Salvatore Emblema, Senza titolo, 1978

F.B.