Pour tout amateur d’art contemporain, ART BASEL est « the place to be ». Tous les ans à la mi-juin, artistes, galeristes, collectionneurs, professionnels de l’art du monde entier se donnent rendez-vous à Bâle durant la Foire Annuelle d’Art Contemporain.

Art Basel, parvis principal

Art Basel, parvis principal

Les chiffres : 43 ème édition – On dit aussi ART BASEL 43

  • 65000 collectionneurs, artistes, conservateurs et amateurs d’art s’y sont rendus
  • 300 galeries présentes (sur 1000 candidatures)
  • 2500 artistes exposés
  • En parallèle de l’exposition principale : Art Unlimited,  un espace d’exposition pour les œuvres monumentales des artistes présentés par les galeries. Spectacles vivants, installations, sculptures de grandes dimensions sont mises en valeur dans un hall immense.

Bref du lourd on vous dit…Petite précision découverte sur place : si la Foire est dédiée à l’Art Contemporain, les galeries exposent également des artistes dont les réalisations sont antérieures à la période dite « contemporaine » (cf. billet « Qu’est-ce que l’art contemporain ? »), je me suis donc retrouvé parfois avec surprise face à des œuvres d’avant 1945. En tout cas c’était ma 1ère fois à Art Basel et je souhaitais vous faire partager mes sensations  « d’explorateur » d’une telle manifestation.

Tout heureux de pénétrer dans le Hall 2 de l’exposition ce jeudi 14 juin, je ressens la fébrilité complice d’une foule dense et bigarrée pressée de rentrer dans le vif du sujet. Hommes d’affaires, étudiants en goguette, touristes, amateurs d’arts éclairés, futurs acheteurs, tous se pressent pour accéder au hall. Je me dirige alors fébrilement vers l’un des points de contrôle validant l’accès à l’exposition. Rapidement je me sens comme le gamin que j’ai pu être devant les rayonnages d’une boutique de bonbons !!! De toutes les couleurs, pour tous les styles ; je voudrais tout sentir, tout voir, mais devant le nombre de galeries présentes je risque l’indigestion carabinée !!!  

Art Basel, hall 2

Art Basel, hall 2

Beaucoup de personnes vous diront qu’ART BASEL est avant tout un lieu « snob », la capitale éphémère d’un royaume de nantis. En pleine crise économique, on peut le voir sous cet angle certes. Mais on peut aussi s’extraire de ces considérations et s’abreuver de la beauté des œuvres présentées, tout simplement. Alors je ne vous parlerai pas – dans ce billet en tout cas – des ventes, quelquefois record, qui se sont conclues durant ART BASEL pour des valeurs sures : Gerhard Richter, Andy Wahrol et autres Mark Rothko. Je vous conduirai à l’inverse vers les artistes exposés que j’ai pu découvrir et pour qui j’ai eu un coup de cœur, tout en regrettant de ne pas avoir prolongé ma visite d’une bonne journée supplémentaire pour parachever mon indigestion artistique !

╣Andrea Geyer et Simon J. Ortiz, représentés par la galerie Peter Blum – œuvre présentée : Spiral Lands / Chapter 3 / in progress.

Andrea Geyer et Simon J.Ortiz - Spiral Lands Chapter 3

Andrea Geyer et Simon J.Ortiz – Spiral Lands, Chapter 3

Tout au bout de la 1ère allée des photographies noir et blanc m’intriguent, non pas tant le procédé employé, assez simple, mais plutôt l’adéquation entre le visuel ( Andrea Geyer ) et le texte ( Simon J. Ortiz ). Ces 2 artistes ont conçu une série de photographies en noir et blanc de paysages désertiques, appartenant à des états du Sud Ouest américain, et qui engagent une conversation avec des textes poétiques, notés à même le cadre. Une grande force romanesque se dégage de ces clichés qui semblent habités par un esprit ou une présence. A moi ils m’ont rappelé des paysages mexicains arides. Ce projet, baptisé « Spiral Lands », présente 2 autres cycles réalisés de 2007 à 2009.

Une série de photos réalisés pour ce projet en 2008 ↓

Spiral Lands, Chapter 2, 2008

Spiral Lands – Chapter 2, 2008

→ Ci-dessous le lien sur la page du site d’Andrea Geyer consacrée aux photos de ce 3ème cycle.

Pour ceux que l’anglais n’effraie pas je vous conseille de lire le projet consacré à Spiral Lands et c’est sans surprise que vous verrez qu’il se rapporte, entre autre, à la culture des indiens d’Amérique. Quand je vous disais que ces photos sont “habitées”…

╣Zimoun, représenté par la galerie Denise René – œuvres présentées : 2 installations aux titres non identifiés. Mais à y entendre et regarder de plus près, une œuvre de Zimoun m’est désormais facilement reconnaissable !!!!

Je vous laisse découvrir cette vidéo sur le site de l’artiste qui présente ses travaux.↓

Alors, surprenant non ? Zimoun est un artiste suisse né en 1977. C’est un autodidacte qui met en scène des installations sonores à partir de mécanismes récupérés. Il travaille ensuite sur la répétition du mouvement mécanique qui produit une sonorité unique. Ces installations sont de véritables sculptures sonores conçues de manière poétique. Il crée à lui seul sa propre architecture vibrante et rien que pour ça ses installations valent le détour ! C’est aussi avec ce genre d’artistes que l’art contemporain donne l’occasion d’être surpris par un processus de création.

Je vous propose de découvrir son site Internet, par ailleurs très bien fait

╣Damian Loeb, représenté par Acquavella Galleries – œuvre présentée : Being There, 2005. ↓

Damien Loeb - Being There, 2005

Damian Loeb – Being There, 2005

Moi qui aime bien la peinture hyperréaliste – quand elle est inspirée – mon œil s’est de suite arrêté sur « Being there ». On imagine assez bien l’arrêt sur image figuré au travers de la vision du personnage de la toile, mais qu’y a t-il donc au loin sur cet île ? Si vous souhaitez aller plus en avant avec Damian Loeb sachez que cette peinture est issue d’une série de 11 œuvres intitulées : « Like Crime Scenes Waiting to Happen ». L’artiste qui est aussi photographe (tiens c’est étonnant!), confie son obsession pour l’option « pause » de son lecteur DVD quand un détail d’une scène l’intrigue. A sa manière Damian Loeb restitue cet instant d’éternité avec une vision menaçante.

Interview avec Damian Loeb sur la série Like Crime Scenes Wanting to Happen – sur le site http://www.mymodernmet.com/

Pour en voir plus voici le lien vers le site de l’artiste

╣ Chris Hipkiss, représenté par la galerie Suzanne Zander – œuvre présentée : The Birds of Europe, 2012. ↓

Chris Hipkiss - Birds of Europe, détail

Chris Hipkiss – Birds of Europe, détail

Chris Hipkiss réalise de grands dessins surréalistes au crayon. The Birds of Europe est extrait de la série « Birds & Sun». J’aime beaucoup les scènes représentées par Hipkiss car elles nous entraînent dans un autre univers ; le dessin fourmille de détails, certains sont amusants à isoler comme le personnage féminin ci-dessus. Original !!!

Découvrez l’univers de Chris Hipkiss sur son site

Le lien direct pour la série « Birds & Sun » :

╣ Ettore Spalletti, représenté par Galerie Helga de Alvear – l’œuvre présentée est une installation de plusieurs tableaux et sculptures, le stand était exclusivement dédié à l’artiste.

Voici un aperçu de l’installation du show consacré à Ettore Spaletti durant Art Basel ↓

Ettore Spalletti, aperçu du stand

Ettore Spalletti, aperçu du stand

C’est mon coup de cœur de cette journée haletante, un véritable espace de détente sensuel et reposant dû aux toiles pastels monocolores du maître ! Ici, l’azur et le rosé dominent dans des successions de tableaux (triptyques). Spalletti propose aussi des sculptures géométriques posées à même le sol et de couleur pastel également. Né en 1940, Ettore Spalletti est un des plus grands artistes contemporain italien avec des participations aux plus grandes biennales, et des expositions dans le monde entier. C’est en utilisant des formes géométriques très simples, alliées à des dégradés de couleur pastel, que l’artiste crée un effet plastique épuré et unique ;  une grande découverte pour moi qui confirme que de la simplicité naît de belles choses !

Lien sur le site italien La Repubblica pour apercevoir des œuvres présentées sur le stand de la Galerie (à voir 11 photos successives) – le diptyque  “Fiore di pesco”, 2007 était présent sur le stand

Et surtout : une interview et promenade visuelle au cœur des installations de Spalletti !!!, observez au passage les bords des tableaux ↓

╣Hiroshi Sugimoto représenté par la galerie Christian Nagel – œuvre présentée : Série Polarized Colors, 2010 – projet développé avec la société Hermès Editeur. ↓

Hiroshi Sugimoto - Polarized colours, extrait

Hiroshi Sugimoto – Polarized colours, extrait

Hiroshi Sugimoto propose une série de développements photographiques composés sous la forme de carrés, et imprimés sur des pellicules de polaroid. Reprenant les travaux et observations de Isaac Newton sur le spectre lumineux, l’artiste a développé « un dispositif expérimental d’observation permettant aux rayons du soleil de faire naître chaque matin, en traversant un prisme, un monde de couleurs, projeté comme une ombre sur les murs blancs de l’atelier » – Pierre-Alexis Dumas, Directeur artistique d’Hermès – . Ces spectres lumineux sont ensuite photographiés pour donner ce résultat incroyable. Sugimoto redécouvre le spectre des couleurs et nous donne accès à des couleurs insensées. Pour ce projet l’artiste a travaillé avec la société Hermès, à qui il a proposé de fixer sur les célèbres carrés de la marque le résultat de ses pérégrinations chromatiques.

Les 140 carrés créés par Sugimoto pour Hermès Editeur

L’émission de télévision japonaise « Tokyo.Designers.Week TV », sous-titrage anglais, en présence de l’artiste qui explique son process de création ↓

Redécouvrez un billet précédent dans le quel je parle de Garry Fabian-Miller, artiste qui développe comme Sugimoto un art chromatique

╣Neo Rauch représenté par la galerie Eigen + Art Berlin – œuvre présentée : Abendmesse

Neo Rauch - Abendmesse

Neo Rauch – Abendmesse

Sans connaître Neo Rauch, dont j’ai appris plus tard qu’il était considéré comme un des plus grands peintres surréalistes contemporains – digne héritier de Magritte pour certains –  je me suis arrêté net devant cette toile. Pourquoi ? J’avais une sensation de déjà vu, comme si mes repères de la culture occidentale (ici une scène moyennageuse), étaient transposés dans notre ère moderne – fond du tableau – , bref une étrange impression. Découvrez l’imaginaire qui s’exprime dans les œuvres de Neo Rauch, saisissant! ↓

Rassasié par cette profusion artistique je me dirige vers le Hall Art Unlimited ou, comme son nom l’indique, les œuvres présentées nécessitent une surface d’exposition plus grande. ↓

Art Unlimited, aperçu

Art Unlimited, aperçu

Là encore il m’aurait fallu plus de temps pour savourer, enregistrer, voir et écouter. Ce grand espace permet en tout cas au visiteur de respirer après la fréquentation des 2 halls principaux. C’est donc sereinement que je vous fais partager 3 projets artistiques, émanant de 3 artistes confirmés.

╣Kim Sooja, représenté par Kukje Gallery – œuvre présentée : Thread Routes – Chapter 1, 2010 – Film 24:52, filmé à l’origine sur 16mm et transféré sur format HD, son 5.1 ↓

Kim Sooja - image extraite de Thread Routes

Kim Sooja – image extraite de Thread Routes

Je ne m’attendais pas à retrouver Kim Sooja après mon précédent billet qui lui était entièrement consacré. Dans ce nouveau film, l’artiste nous propose une ballade anthropologique au Pérou, en juxtaposant des plans filmés de couture traditionnelle indienne avec des vues sur l’habitat et les surfaces agricoles locales. Si vous avez l’occasion de regarder ce film lors d’une exposition, faites au début un effort de patience qui sera récompensé par une immersion profonde au cœur de la culture péruvienne (effet de la façon de filmer en 16mm). En plus d’être un document sur la culture péruvienne, il ressort du travail de Kim Sooja une grande force poétique.

→ Pour aller plus en avant sur cette œuvre, interview de Kim Sooja sur le site ART IT, dernière partie de l’interview.

╣Thomas Ruff représenté par Mai 36 Galerie – œuvre présentée : ma.r.s. 13, 2011

Thomas Ruff - ma.r.s.13, 2011

Thomas Ruff – ma.r.s.13, 2011

Artiste de renommée mondiale Thomas Ruff a eu l’idée de travailler sur des clichés de la planète Mars réalisés par la NASA. A partir de ce matériel de base, l’artiste a transformé ces clichés en se demandant ce que verrait un astronaute en survolant la planète de près. Le résultat est une série de photographies – Stellar Landscapes – qui sont à la fois visuellement magnifiques et fantasmatiques si on se projette comme un visiteur de la planète. Alors, prêt pour une promenade sur Mars ?

Une vidéo très bien réalisée sur le travail de Thomas Ruff pour la série Stellar Landcapes ↓

La page du site de la Galerie Mai 36 dédiée aux photographies ma.r.s.

╣Philip-Lorca Dicorcia représenté par la galerie David Zwirner – œuvre présentée : THOUSAND

Philip-Lorca Dicorcia - Thousand, extrait

Philip-Lorca Dicorcia – Thousand, extrait

J’avais eu le bonheur de connaître le travail de ce photographe américain au travers de ses photos urbaines, je suis d’autant plus heureux de vous le faire découvrir si vous ne le connaissez pas.

Philip-Lorca Dicorcia a le don pour capturer des instantanés, des moments d’expression humaine très forts. Dans cette installation « THOUSAND », l’artiste a sélectionné 1000 clichés polaroids de petites dimensions (de 6,7 x 8,4 cm à 13 x 10,5 cm), qui sont fixés au mur les uns à la suite des autres pour former une ligne de vie ininterrompue. Le nombre de polaroids se succédant étant conséquent, l’installation serpente comme un labyrinthe. Ces polaroids embrassent 25 années de la vie artistique de l’artiste. Ils représentent aussi bien des séries réalisées sur la vie familiale du photographe que des séries consacrés à des paysages ou des scènes de rues. La force des clichés réside dans leur humanité et le travail sur leur luminosité. Au sortir de ce labyrinthe, je suis tenté de dire que c’est une vie que j’ai vue défiler, celle d’un artiste et aussi de son pays ; vitalité et nostalgie se croisent. C’est la 1ère fois que l’installation est présentée en Europe, un livre a été réalisé en 2007 sur cette sélection de clichés.

Vous trouverez sur ce lien la page consacrée  à THOUSAND par le critique d’art américain Aaron Schuman – malheureusement je n’ai pas de photo disponible de l’installation à vous proposer.

Je vous ai fait partager mes coups de coeur, et vous, avez-vous été à Art Basel et qui avez-vous vu ? Répondez-moi, je lirai tous vos commentaires.

F.B.