Le Museum of Modern Art de New York, communément appelé le MoMA, propose aux internautes curieux d’approfondir leurs connaissances, des ressources pédagogiques variées et multiples.  Le rédacteur d’Artdesigntendance est ainsi tombé, par hasard, sur un document interactif particulièrement bien réussi en lien avec l’exposition Inventing Abstraction, 1910-1925, que le musée organisa du 23 décembre 2012 au 15 avril 2013. ↓

Joseph Albers, Gitterbild, 1921

Joseph Albers, Gitterbild, 1921

Pourquoi m’être arrêté sur ce document ? Plusieurs raisons à cela :

╠ Tout d’abord, l’exposition en elle-même cerne un instant crucial de la production artistique moderne : l’invention de l’abstraction est un tournant dans l’histoire de l’art dans le sens où l’artiste n’est plus cantonné à la mimesis (représentation du réel qui a prévalu pendant des siècles). Dixit Leah Dickerman, curatrice de l’exposition, les artistes ont lutté contre des siècles de tradition bien ancrés (« struggling, freaking a way with four hundred years of Victorian tradition»). Autant dire que  le génie d’un Picasso, combiné à d’autres de ses contemporains, ne fut pas de trop pour accoucher d’une telle révolution !

╠ Votre serviteur s’est aperçu qu’il aimait l’art contemporain en réaction à l’ennui profond qu’il éprouvait parfois à la vue de ce qu’on présente comme des références picturales universelles, surtout en France – Le Titien, Vélasquez, Goya, l’école hollandaise et flamande puis, plus tard, les premiers impressionnistes français. En somme, je ressentais comme une indigestion de culture bien-pensante, me disant qu’il devait bien existait autre chose, quelque part…L’abstraction met fin, quelque part, à cette accumulation représentative.  Est-ce que je mérite la potence pour cette déclaration ?↓

Alberto Magnelli, Le Café, 1914

Alberto Magnelli, Le Café, 1914

╠ Un constat: cette révolution culturelle préfigure l’art moderne et contemporain. Il donne un sens au développement de pratiques qui ne sont plus seulement limitées au seul terrain pictural : l’architecture connaît à cette période un renouveau théorique et appliqué  – cf. billets : https://artdesigntendance.com/bojan-sarcevic-eloge-de-la-transparence/ et https://artdesigntendance.com/le-bauhaus-en-technicolor/. Plus intéressant encore, c’est en réaction à l’abstraction que naissent des courants comme la figuration narrative d’où émerge la figure tutélaire d’un Jacques Monory, qui m’est ô combien précieux – cf billets https://artdesigntendance.com/jacques-monory-des-bleus-a-lame/ – ou encore, d’une autre manière, le pop art –cf billet https://artdesigntendance.com/roy-lichtenstein/).

╠ Enfin, bien que traitant d’une période artistique qui n’est pas l’objet de ce blog, le document interactif que met en ligne le MoMA sur son site, est un modèle pour qui veut creuser et comprendre les relations entre les acteurs essentiels de cette période clé ! Le dit-document, enfin ! ↓

Ressource pédagogique du MoMA, diagramme interactif de l'exposition Inventing Abtsraction 1910-1925

Ressource pédagogique du MoMA, diagramme interactif de l’exposition Inventing Abtsraction 1910-1925

 

Ressource pédagogique du MoMA, diagramme interactif de l'exposition Inventing Abtsraction 1910-1925, Zoom sur Fernand Léger

Ressource pédagogique du MoMA, diagramme interactif de l’exposition Inventing Abtsraction 1910-1925, Zoom sur Fernand Léger

Vous pouvez consulter le document directement sur le site du MoMA dans la rubrique MULTIMEDIA puis allez sur INTERACTIVE. A noter que les artistes avec un point rouge sont ceux qui ont entretenu le plus de relations avec d’autres de leurs contemporains, ce qui les place de facto au centre d’une dynamique jamais vue depuis la Renaissance. Ci-dessous une vidéo qui explique la façon dont a été conçu ce diagramme interactif. Une collaboration entre le MoMA et la Columbia Business School : ↓

En somme, au début du siècle précédent Internet n’existait pas. Pour autant, poussés par l’envie de repousser les limites de leur art et d’explorer une nouvelle vision artistique, des artistes confirmés ou débutants ont insufflé une dynamique jamais vue depuis la Renaissance. Leurs échanges, dans des groupes qui parfois s’autoproclamaient du nom d’une mouvance,  constituèrent le premier réseau social. C’est cette image que nous laisse en tête le MoMA ; faut-il s’arrêter à cette première lecture qui ferait de ces années -1910-1925- une période au bouillonnement exceptionnel, ou bien se dire que l’histoire se répète à d’autres époques, avec d’autres acteurs ? Votre serviteur lui, bien incapable de trancher la question, a vivement souhaité mettre en valeur une ressource pédagogique captivante.

F.B.